L'évolution de la production dans le monde

La production s'est déplacée de l'Occident vers l'Asie. Prenons par exemple la production mondiale de ciment. La Chine produit plus de 59% du ciment contre 2% pour les USA (moins de la moitié de l'Afrique et la même chose que l'Iran) et environ 5% pour l'Europe (statistiques 2012). La différence de production pour l'acier est également très importante. La production de navires est quasi totalement aux mains des pays asiatiques, celle des véhicules à moteur est en train de suivre la même courbe. La production d'avions civils est en train de démarrer en Asie et d'ici 5 ans, la situation sera, dans ce domaine, la même que la production de véhicules aujourd'hui. Faut-il parler du matériel électronique dans lequel la domination de l'Asie est écrasante? La conquête de l'espace est, elle aussi, en train de basculer vers l'Asie, etc...

En fait, nous transformons les usines, tout ce qui compose l'économie réelle, en argent... tandis que les Asiatiques se servent de l'argent comme moyen pour développer leur industrie, la technologie. L'industrie financière s'est substituée à l'économie réelle. Il est plus facile de créer de l'argent à partir de rien plutôt que de passer par les stades "conception, production et vente" d'un produit utile pour la population ou que d'investir dans les moyens de production de l'économie réelle.

Nous consommons pendant que les autres pays produisent en avançant l'argument qu'ils ont besoin de notre argent, de nos devises fortes. En quoi nos devises seraient-elles fortes ? Parce que nous imposons le dollar comme moyen d'échange grâce aux petrodollars appuyés par une intervention militaire chaque fois qu'un pays ne veut plus l'accepter? Ces devises "fortes", qui nous permettent d'échanger des produits et ressources naturelles contre du "papier monnaie" ou des écritures dans des ordinateurs créées à volonté sans base économique réelle, reposent sur la domination militaire de l'Occident sur la planète. Celle-ci a eu pour fondement la domination technologique et industrielle de l'Occident. Aujourd'hui cette domination a pris fin. Du point de vue de l'économie réelle et non en valeur financière, l'économie réelle de l'Occident représente moins de 15% de la planète contre largement plus de 50% pour la Chine, le Brésil, l'Iran et la Russie. De même il n'y a plus de technologie qui ne soit uniquement qu'aux mains des pays occidentaux, au contraire... Nous allons bientôt découvrir que les autres pays peuvent se passer de nos devises fortes...

Le décrochage entre le monde réel et le monde dans la tête des gens

L'éducation et les médias ont fini par persuader l'immense majorité de la population que la vraie richesse est l'argent. Mais si ceux qui pensent que l'argent est la vraie richesse devaient passer quelques années seuls sur une île déserte perdue au milieu de la mer sans rien d'autre qu'une valise pleine de billets (de l'argent), peut-être découvriraient-ils l'importance d'un appareil à énergie solaire pour dessaler l'eau de mer, d'une lampe, d'allumettes, d'outils, de couteaux, d'une canne à pêche, de médicaments, d'une tente, d'un sac de couchage, d'habits de rechange, de savon, de papier toilette, etc... Peut-être comprendraient-ils enfin que l'énorme quantité d'argent à l'intérieur de leur valise ne les empêchera pas de mourir de soif, de faim, de froid... à court terme. Peut-être comprendraient-ils que l'argent n'a de valeur que seulement si, d'une part, il existe des produits à échanger et si, d'autre part, les producteurs trouvent un intérêt à échanger ces produits contre ce qu'est vraiment l'argent, c'est-à-dire du papier ou des écritures dans des ordinateurs dont la valeur repose sur une croyance fondée ou non... Quel intérêt les producteurs auraient-ils à travailler des mois ou des années pour échanger le produit de leur travail contre du papier imprimé en quelques minutes ou des écritures dans des ordinateurs réalisées en quelques secondes ?

En s'appuyant sur la vie quotidienne à très court terme, effectivement, le système économique actuel impose l'argent comme essentiellement le seul moyen d'accès à la consommation, aux différents services. Poser la question de savoir comment les produits achetés sont fabriqués et arrivent ensuite dans les points de vente est considéré comme une simple question de logistique. Rares sont ceux qui peuvent imaginer que le système puisse s'arrêter. La plupart pense qu'il y aura toujours quelqu'un pour produire et livrer puisque "tout le monde a besoin d'argent, de nos devises". Poser la question de savoir pourquoi les producteurs et particulièrement ceux des autres pays auraient absolument besoin de nos devises est quasi considéré comme une hérésie. C'est pourtant là un des noeuds du problème.

La valeur du dollar et de l'euro qui lui est en partie associé est fondée sur les pétrodollars. C'est-à-dire sur l'accord passé entre les Etats-Unis et la plus grande partie des pays producteurs de pétrole (quasi tous au départ) pour vendre le pétrole exclusivement en dollars et ensuite recycler ces pétrodollars dans les bons du trésor américain (la dette des USA). Ce système astucieux permettait à l'Occident d'extraire encore plus de richesses des pays de la planète que la colonisation et cela à moindres frais. Il permettait surtout aux Américains de dépenser sans compter puisqu'il leur suffisait d'imprimer des $ à volonté. C'est la remise en question de ce système par le Président irakien Saddam Hussein qui fut à l'origine de l'attaque contre son pays en 1991 puis en 2003. Même chose pour le Président libyen Gaddafi. Seulement, aujourd'hui, ce système financier est remis en question par d'autres pays, non seulement l'Iran (ce qui là aussi explique les bruits de guerre contre ce pays) mais également par le Chine, la Russie ce qui complique la situation. Il y a un fort risque de guerre mondiale, ce qui, pourtant, ne fera qu'aggraver le déclin de l'Occident.

La situation se complique encore parce que pour maintenir, voire affermir sa domination grâce aux moyens financiers qu'il peut créer à volonté, le secteur financier s'est emparé de pratiquement tous les médias en Occident. Le résultat de cette domination complète sur les sociétés occidentales, associé à la quasi disparition des moyens de production, est la création d'un monde culturel et social totalement artificiel dans lequel une forme de réalité virtuelle "contrôlée" a remplacé le monde réel. Un des moyens utilisés pour y parvenir fut la création et le renforcement des angoisses inconscientes de la population. Si cela fut très efficace pour prévenir toute tentative de révolte en empêchant les craintes générées par la situation matérielle extérieure de susciter une réfléxion pouvant aboutir à une remise en question du système, cela a eu aussi pour résultat de figer la situation, empêchant toute évolution. Une sclérose quasi totale s'est installée dans nos sociétés. A cela s'ajoute l'ampleur extraordinaire de l'utilisation d'antidépresseurs, de la surconsommation d'alcool, voire de drogues, par les populations pour tenter d'apaiser cette angoisse intérieure. L'expansion extraordinaire de l'industrie financière a permis à quelques-uns de s'enrichir énormément (du moins en termes monétaires) mais a contribué à accélérer fortement la désindustrialisation de l'Occident ainsi que la prise de conscience de l'absence de fondement à la base de la "valeur" de nos devises. La structure psychologique des populations, modifiée par les angoisses inconscientes, a abouti à la formation d'individus repliés sur leur monde intérieur, leurs intérêts à court terme. Pratique pour "diviser pour régner" mais désastreux pour la cohésion sociale, la stabilité des familles avec entre autres conséquences un taux de divorce catastrophique. Les sociétés occidentales se désintègrent de l'intérieur. Un retour en arrière n'est plus possible. Il n'y aura pas de "reprise" dans laquelle tout redeviendra comme auparavant ! Malheureusement, la réalité virtuelle qui a pris la place de la connaissance du monde réel, du moins dans la tête des gens, ne permet plus à ceux-ci de prendre conscience de l'extrême fragilité de notre économie, particulièrement sur le plan des bases nationales de l'économie réelle.

Détruire le tissu industriel pour lui substituer une "économie financière" est une forme d'autodestruction à moyen et long termes. A court terme, la croissance monétaire du produit national accompagnée par une chute considérable du volume de la production, n'est qu'une forme de redistribution du pouvoir économique en faveur du monde financier au détriment des intérêts nationaux. Nos pays sont en train d'être détruits par ce qu'il faut bien appeler un "cancer financier"...  Nous devons impérativement redonner la priorité à l'économie réelle si nous voulons survivre, nous et nos descendants, à moyen ou long terme.

Les seules actions pratiques qui nous paraissent encore possibles : innover,  réduire les coûts par l'automatisation et le changement des méthodes de gestion, obtenir des prévisions qui nous permettent de déterminer les nouvelles contraintes qui découleront de l'évolution de la situation et ainsi agir avant les évènements plutôt que réagir après.