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La Chine (partie 2)

Les médias chinois montrent que les nouveaux dirigeants sont en partie conscients des problèmes et tentent de trouver des solutions. Ils montrent également qu'il serait probablement faux de considérer le pouvoir en Chine comme une structure monolithique. Il existe diverses tendances avec un consensus actuel qui peut se modifier à court, moyen ou long terme. Parmi tous les problèmes, l'attrait pour la spéculation est le plus difficile à résoudre. Il provoque le détournement de ressources importantes vers un secteur de l'économie qui ne sert plus à répondre véritablement à des besoins ou à développer l'économie réelle. Le secteur immobilier a été à l'origine d'une énorme spéculation, mais aujourd'hui le pouvoir chinois part du principe que le développement de l'immobilier sert à fournir une habitation aux populations et non à être l'objet de gains spéculatifs. Divers moyens sont mis en oeuvre pour réduire progressivement la bulle immobilière.

Dans l'ensemble, il semble que le modèle chinois ait permis à la Chine d'accélérer fortement son développement économique et technologique. Toutefois, aujourd'hui, ce modèle centré sur l'exportation est devenu un fardeau plutôt qu'un avantage, particulièrement avec l'accumulation de "réserves en devises étrangères ($)" sans valeur. Les Chinois n'ont plus rien à gagner à travailler pour recevoir des bouts de papier... Ils vont très certainement utiliser de plus en plus les ressources de leur industrie pour développer plus rapidement leur pays.

Plus rien ne va arrêter le développement de ce pays dont la taille de l'économie réelle dépasse de loin en volume (- pas en "argent", vu le montant des produits financiers occidentaux !- ) la production totale de l'Occident. Au point de vue technologique, ce pays n'a plus grand chose à nous envier, c'est plutôt le contraire! Dans dix ans nous volerons dans des avions chinois. Non seulement la Chine exporte déjà des avions régionaux de 60 à 90 places mais elle vient de mettre sur le marché des avions gros porteurs pour livraisons 2015-2016 (en fait plutôt 2019-2020 pour le COMAC 919) (Note : il ne s'agit pas d'avions construits sous licence !!). Très probablement les premières colonies sur la lune seront chinoises. Nous ferions mieux de suivre leur exemple plutôt que de tenter de leur donner des leçons.

Il y a bien sûr des tendances orientées "profit" en Chine avec un groupe de dirigeants "pro-américains" (ou plus exactement qui fondent leur position politique sur le "suivisme" du modèle américain) mais rien n'indique qu'ils soient majoritaires et, de toute façon, la situation actuelle avec les contradictions que cette politique a créées va mettre ce courant en difficulté, sans parler de la faillite totale de "l'exemple américain". Cela va certainement entraîner quelques remaniements au sein du pouvoir à relativement court terme (ce qui s'est passé depuis peu). Ce suivisme des USA a quand même eu un certain nombre de conséquences néfastes. Par exemple, la substitution partielle du modèle alimentaire occidental au modèle chinois a pour effet une augmentation parallèle des maladies "occidentales" telles que problèmes cardiaques ou cancers. De même le suivisme du modèle médical occidental a été à l'origine d'une augmentation des coûts du secteur de la santé pour des résultats pas toujours probants dans tous les domaines. Là encore il semble que les nouveaux dirigeants aient pris conscience du problème. Sur le plan médical, les médecines traditionnelles chinoises (TCM) reviennent à l'honneur.

Il serait complètement erroné de croire que les Chinois ne disposent pas, en général, d'analyse en profondeur des problèmes actuels! Le seul point faible de la société chinoise est la non prise en compte de l'impact de l'organisation sociale sur la structure psychologique des individus et de l'impact en retour de cette structure sur la motivation des citoyens. Ce point faible est atténué par une analyse globale mais est néanmoins un facteur qui peut ralentir le développement du pays, poser quelques problèmes au niveau cohésion sociale mais surtout aboutir à une analyse passablement erronée de la situation politique mondiale, particulièrement de la politique américaine en occultant l'aspect totalement irrationnel de celle-ci. Il est en effet possible que l'analyse chinoise repose sur l'illusion que les choix économiques et politiques occidentaux, et surtout américains, se fondent sur une analyse de l'intérêt économique de ces pays ou au moins de leurs classes dominantes, négligeant ainsi, comme l'a d'ailleurs fait Staline face à l'Allemagne nazie, les motivations qui prennent racine dans la structure psychologique des individus en Occident et qui peuvent se résumer par "la recherche du pouvoir, de la domination mondiale" au détriment de toute autre considération logique.

C'est probablement la principale faille de l'analyse chinoise et encore, ce n'est pas sûr parce que, quelles que soient les motivations des dirigeants occidentaux, la mise en oeuvre de leurs plans finit par se traduire par des actions matérielles qui peuvent être détectées! L'absence éventuelle d'analyse correcte des structures psychologiques risque surtout de se traduire, pour les dirigeants chinois, par quelques erreurs de prévisions à moyen ou long terme. Cependant nous ne savons pas ce que connaissent réellement les niveaux les plus élevés de la hiérarchie chinoise.

Quant au choix du développement des exportations fait il y a plus de 20 ans, il peut s'expliquer. Les histoires courtes du premier chapitre du livre peuvent être assimilées à de la simulation. Si, au lieu de faire de la simulation pour les bases élémentaires du développement, on se propulse à un stade plus avancé, les exportations peuvent être, pendant une période intermédiaire, un moyen significatif d'accélérer le taux de croissance de l'économie réelle du pays, du moins pour un pays assez puissant et assez grand comme la Chine! D'ailleurs le choix de rediriger la production vers la consommation intérieure plutôt que l'exportation a déjà été fait ! Les salaires, dans les zones moins développées à l'intérieur du pays, ont été augmentés de façon significative ce qui a permis d'absorber la production qui n'était plus exportée.

Pour compléter le rééquilibrage de l'économie, de grands travaux pour moderniser les infrastructures du pays ont été mis en oeuvre. La Chine disposera d'un réseau de trains à grande vitesse (plus de 312 km/h de moyenne contre 250 pour le TGV français) qui reliera les principales villes du pays. Les premières grandes lignes ont déjà été mises en activité et l'évolution technologique de ces trains s'accélère encore. On parle maintenant de vitesse pouvant atteindre 500 km, à relativement court terme. On en est aujourd'hui à la création d'un très grand réseau de trains ultra-rapides et à la création d'un réseau local de trains à sustentation magnétique et/ou à propulsion électrique avec des ultra-condensateurs comme source d'énergie et donc la fin de la nécessité de disposer de caténaires, au moins pour les lignes qui assurent le trafic local avec comme conséquence une diminution substantielle de la consommation énergétique.

La parade militaire marquant le 60ième anniversaire du fondement de la République Populaire de Chine a clairement démontré les capacités technologiques de ce pays. Dans 10 ans ce sera, et de très loin, la première puissance de la planète dans tous les domaines, y compris militaires, que cela nous plaise ou non, avec ou sans guerre mondiale !

Tout n'est pas positif dans le modèle chinois. Parmi les points négatifs il y a la contrainte imposée aux familles de n'avoir qu'un seul enfant. Cependant le nouveau gouvernement a mis fin à cette restriction. De même l'urbanisation à marche forcée ne me semble pas entièrement justifiée sur le plan économique ou social mais là encore un changement de politique est en cours. Comme dans tout système qui est fondé en partie sur une part d'idéologie pour compenser l'absence de compréhension des mécanismes à la base des motivations de la population et sur un suivisme un peu trop théorique de certains dirigeants, certains cadres utilisent "le bien du pays" comme prétexte pour s'octroyer un pouvoir démesuré qui masque leur incompétence et leur permet de s'emparer de privilèges non mérités. Un des symptômes de cela est la tendance de ces cadres à prononcer des discours creux exigeant "le meilleur", "des gens parfaits", etc... Un gestionnaire compétent ne joue pas au dictateur exigeant mais utilise ses connaissances et son expérience pour analyser les problèmes et améliorer ce dont il a la charge et parle des points concrets à résoudre. Mais une fois de plus, il semble que les nouveaux dirigeants aient pris conscience de ce genre de problème et tentent d'y remédier avec une certaine vigueur.

Ces quelques points négatifs, d'ailleurs en voie d'être corrigés par les nouveaux dirigeants, ne remettent pas fondamentalement en cause le développement de la Chine à moyen ou long terme. Ce pays est déjà la première puissance sur le plan de l'économie réelle et le sera bientôt sur le plan géopolitique.

CIESINT Publié le 2018-04-03 Nombre de lecture 10495

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